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Le dragon de sainte Marguerite

Dernière mise à jour : 25 sept. 2020

dragon par Paul-Amboise Slodtz, ph. A. Ortenzio

Il y a deux siècles, un magnifique dragon de pierre surveillait l’entrée d’une cour à juste titre appelée cour du Dragon dans le 6ème arrondissement de Paris. Cette cour s’ouvrait sur la rue Sainte Marguerite mais de l’autre côté, un dégagement de ladite cour donnait sur la rue du Dragon.


Que raconte la proximité de ces deux rues ? Tout simplement une aventure qui arriva à une certaine Marguerite il y a 17 siècles. Voici son histoire.


La belle Marguerite, jeune chrétienne d’Antioche, refusa les avances d’un préfet romain -donc païen- Olibrius, qui, par dépit, la fit torturer. Il la fit battre avec des pointes de fer puis enfermer dans une prison. Dans la cellule apparut alors un dragon affamé qui, ni une ni deux, hop avala la belle. Plutôt que de se morfondre dans le ventre de la bête, Marguerite se mit à entailler les chairs avec la petite croix qu’elle portait et déchirant le flanc du monstre, elle put en sortir saine et sauve.


Quelques temps après, un tentateur, superbe jeune homme, vint dans la cellule et par de mielleuses paroles et des gestes tendres il voulut convaincre la belle de délaisser sa croyance afin de s'adonner aux plaisirs de la vie. Il crut l’amadouer, mais l’attrapant par les cheveux, la douce Marguerite l’étendit par terre et posant son pied sur sa tête elle lui dit : « Démon orgueilleux, prosterne-toi sous le pied d’une femme !» (Wow !!! Remarquez qu'elle fit exactement le contraire de son ancêtre Eve !). Sous la contrainte, le démon (eh oui, c'était bien lui) lui raconta que Salomon avait bien enfermé tous les diables dans une fiole, mais qu’à sa mort, les hommes l’avaient brisée croyant y trouver un trésor, délivrant ainsi les démons dont il faisait partie. Elle le libéra alors (je me demande bien pourquoi ?).


S'étant débarrassée de ses démons, Marguerite se crut libre. Que nenni! Furieux de ce qu'elle ait pu surmonter ses épreuves, Olibrius ordonna qu'on la brûlat avec des torches ardentes : elle resistait ! Alors on la plongea dans un bassin plein d’eau et comme elle ne se consumait, ni ne se noyait, le préfet la fit décapiter et qu’on n’en parle plus. Mais avant de mourir, la pieuse jeune fille pria Dieu, demandant que chaque fois qu’une femme en couche invoquerait son nom, l’enfant puisse naître sans mal. Victoire : cela lui fut accordé. Son sacrifice n’avait pas été inutile !

Marguerite fut faite sainte.


Rappelons que Marguerite est fêtée le 20 juillet. C’est la période caniculaire, le moment où le soleil est le plus ardent (souvenez-vous des torches qui la brûlaient) et on invoque alors la pluie (le bassin d’eau…). Notons que Sainte Madeleine, fêtée le 22 juillet est aussi une sainte caniculaire invoquée pour la pluie (le ruissellement de ses cheveux onde-ulant sur son corps…).

Sainte Marguerite, parce qu’elle maîtrisa le dragon, est une sainte saurochtone tout comme sainte Marthe dont curieusement la rue était perpendiculaire à la rue Sainte Marguerite…

L’entrée de la cour du Dragon se trouvait autrefois rue de l’Egout devenue aujourd’hui rue de Rennes. Une copie du dragon se trouve au N° 50 de cette rue.


Ah, au fait, il n’y a pas si longtemps, dans certaines régions on passait encore une ceinture, dite « ceinture de sainte Marguerite » autour des reins des femmes enceintes pour faciliter l’accouchement. Eh oui… (pour en savoir plus à ce sujet, il suffit de lire l'inventaire des motifs mythologiques constitué par le Groupe Atlas pour la SMF Société de Mythologie Française)


Maintenant, peut-être vous demandez-vous pourquoi le dragon fut sculpté sur la façade du portail monumental? Tout simplement parce que l'épouse du commanditaire s'appelait Marguerite.


Et pour terminer une petite devinette : A votre avis, quel est le rapport entre ces illustrations?

Vous pouvez répondre dans le commentaire en fin de page.













Illustrations :

Dragon sculpté de l'en-tête : sculpture de Paul-Amboise Slodtz conservée au musée du Louvre. Photo : Anastasia Ortenzio

Sainte Marguerite issant du dragon (BNF)

Venus surgissant des eaux (Botticelli)





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